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Dès le 6 juin, les Anglo-canadiens se trouvent confrontés aux difficultés du terrain et à la technique de combat allemande. Ce sont ces facteurs qui empêchent la prise de Caen le 6 juin et la repoussent au 9 juillet. Montgomery compte avant le déclenchement d’Overlord sur la rapidité de l’avancée des troupes débarquées au moins pour atteindre les faubourgs nord de Caen en prenant les Allemands au dépourvu. Or, dès le 6 juin, les Allemands posent un « verrou blindé » devant Caen après l’échec de la contre-attaque de la 21e panzer. Celle-ci s’enterre au nord et au nord-est de la ville, tandis que la 1ère pz SS « Hitlerjugend » contre-attaque les Canadiens sur son flanc gauche les 7 et 8 juin, avant de prendre également des positions défensives. Vient s’ajouter au dispositif la 3e pz « Lehr » à l’Est de Caen.
Britanniques et Canadiens essayent donc de briser cette défense échelonnée en profondeur et appuyée sur des blindés et une artillerie de campagne redoutable pendant toute la bataille de la plaine de Caen.
Pour cela, Montgomery compte sur plusieurs atouts stratégiques d’importance. Il souligne d’abord l’importance du bombardement massif par l’aviation, suivi d’une intense préparation de l’artillerie de campagne et des gros calibres de la Navy qui atteint sans mal des objectifs situés à 20km à l'intérieur des terres. La RAF et l’USAAF sont donc constamment sollicitées pour ouvrir l'attaque par de véritables « tapis de bombes » (« carpet bombing») largués au-dessus des zones d'attaque. C'est seulement une heure après la fin du bombardement que les soldats entrent en contact avec l'ennemi, appuyés par des blindés. Les troupes à pied ont du mal à suivre les blindés et arrivent face aux Allemands déjà fatigué par une progression prudente et rendue laborieuse par les tireurs isolés ou des groupes épars. Cette longue préparation annule tout effet de surprise et donne le temps aux Allemands de se ressaisir, d'autant plus que les bombardements comme le pilonnage sont loin de détruire avec précision des positions enterrées et camouflées. Les Allemands transforment les villages - souvent réduits à l'état de ruines - en des points d'appuis pourvus d'artillerie et de chars. Le maillage épais que forme le front allemand à partir de ces villages brise ou ralentit la progression du fer de lance de l'attaque alliée.
A cela s'ajoutent des facteurs plus techniques qui ont au moins autant d'importance que les aspects précédents ; les chars Panther, Tigre et même Tigre royal disposent des redoutables canons de 88mm qui percent facilement le blindage frontal des Sherman et Cromwell constituant la majorité des chars utilisés par les Britanniques et les Canadiens pour mener des attaques rapides, mais aussi celui des Churchill, pourtant plus lourds. En revanche, les chars allemands résistent bien aux tirs des 75mm britanniques car ils disposent d'un blindage plus épais (par exemple les 110mm de blindage frontal du Tigre). La supériorité numérique ou l'habileté et l'expérience des équipages de char seuls peuvent permettre aux alliés de faire la différence avec leur ennemi. Il faut donc compter 5 Sherman détruits pour un Tigre mis hors de combat, ce qui explique le gâchis de matériel côté anglo-canadien. Car en effet, dans la stratégie de choc frontal qu'a choisi Montgomery, la prééminence aérienne ne suffit pas : les chasseurs-bombardiers, bien qu'efficaces contre les chars allemands, sont soumis aux aléas météorologiques. En conséquence, la supériorité des chars est indispensable et elle lui fait cruellement défaut.
En réalité, c'est l'ensemble du Panzergruppe West qui est engagé progressivement dans la région de Caen sous le commandement du groupe d'armées B : les Anglo-canadiens doivent donc faire face à un nombre de blindés considérable. Nombre de divisions du panzergruppe sont expérimentées, et pour certaines, fanatisées : les Ier et IIe corps SS engagés autour de Caen comptent dans leurs rangs la 12e panzer SS « Hitlerjugend » (qui recrute directement les jeunes nazis sortant des jeunesses hitlériennes), la 1ère panzer SS « LAH » (« gardes du corps d'Adolf Hitler »), pour ne citer que les unités les plus tristement célèbres et combatives de la Waffen SS.
Néanmoins, Montgomery ne modifie pas sa stratégie au cours des trois premières tentatives de percée d'envergure en Normandie ' Epsom, Goodwood, Totalize. Chaque fois, l'absence d'effet de surprise et la profondeur de la défense allemande provoque un inévitable embourbement. Les troupes allemandes, lorsque le front est rompu, font preuve de ténacité et sont capables de résister en se réorganisant rapidement de manière autonome. Ce n'est qu'à l'opération Totalize que de multiples aspects tactiques sont revus : le « tapis de bombes » précédent l'opération est concentré sur une partie plus réduite du front allemand, des unités légères motorisées et des blindés alliés sont lancés plus alors que la fumée des bombardements n'est pas encore dissipée tandis que les premiers fantassins sont transportées par camion près de leur lieu d'engagement. S'il est vrai que la défense allemande est affaiblie lors de Tractable et n'a plus les moyens matériels de contenir l'offensive anglo-canadienne, la percée est bien mieux exploitée par les Anglo-canadiens : les fantassins en grand nombre suivent dans la brèche les blindés pour couvrir les flancs de la percée.
Les difficultés auxquelles Montgomery doit faire face dans la campagne de Caen vont bien au-delà de ce que le SHAEF a prévu : au déclenchement d'Overlord, « Monty » veut que la IIe armée britannique soit le moteur de la progression alliée sur le front normand. Or, au vu du tour que prend la situation, il tient un autre discours à Eisenhower ; il déclare après plusieurs tentatives infructueuses pour percer que le rôle des armées britannique et canadienne est de « clouer » la majorité des forces allemandes et faciliter la tâche des Américains. Cela ne l'empêche pas de continuer à lancer des offensives très coûteuses en hommes et en matériel, ce qui commence à excéder Eisenhower quand Goodwood échoue.
Cette stratégie, bien que s'imposant par la détermination allemande - celle du Führer en personne - de tenir Caen et sa région à tout prix, n'en rend pas moins possible la réussite de Cobra, concentrant de fait les meilleures unités face au secteur anglo-canadien. Savoir si une autre stratégie aurait pu provoquer le même effet avec des pertes moindres côté allié reste une question difficile à résoudre, d'autant plus que la facilité de la rétrospection est un atout dont ne dispose pas l'Etat-major britannique au moment où il définit ses plans de campagne.
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Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 08/09/2006.
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